Comme l'oiseau qui change de nid, ce blog change aussi d'hébergement.
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Dix jours en "terre sainte"
mercredi 6 octobre 2010
jeudi 30 septembre 2010
Les saints lieux sont-ils vraiment les bons ?
Autant régler le problème tout de suite.
Quand on arrive en Terre sainte, la question arrive dès les premiers rayons du (chaud) soleil. Est-ce vraiment ici ? Est-ce bien là que ça s'est passé ? Suis-je sur le lieu authentique?
Le Saint-Sépulcre, à Jérusalem, est-il bien construit sur le mont Golgotha ? A priori, c'est oui.
Jésus a-t-il été enfermé dans ce cachot comme on nous le dit ?
Ce puits, est-ce vraiment celui d'Abraham ?
Le corps du Christ a-t-il été déposé sur cette dalle rectangulaire, la pierre de l'onction, qui ne fait vraiment pas son âge ?
Première option : on ne doute pas. On traverse l'église sur les genoux et les yeux humides. On vide ses poches sur la pierre pour bénir tout ce qu'on transporte avec soi. Pas de doute. Je ne sais plus où j'ai entendu ça, mais je partage : "La foi, c'est le doute".
Ces lieux sont saints parce c'est ici que ça s'est passé. Les pierres. La fontaine. La poussière. Dans un élan de mysticisme, chacun va récolter un peu de cette terre dans un sac ou une bouteille, au risque d'avoir de gros ennuis à la sécurité de l'aéroport. Cette dévotion, cette extase, cela m'a toujours mis mal à l'aise.
Cité par Régis Debray dans son excellent livre, Un Candide en Terre sainte, voici ce qu'en disait Flaubert, en 1850, dans une lettre à sa maman (Pour la citation, je te fais confiance, hein Régis).
Quand on arrive en Terre sainte, la question arrive dès les premiers rayons du (chaud) soleil. Est-ce vraiment ici ? Est-ce bien là que ça s'est passé ? Suis-je sur le lieu authentique?
au Saint-Sépulcre |
Jésus a-t-il été enfermé dans ce cachot comme on nous le dit ?
Ce puits, est-ce vraiment celui d'Abraham ?
Le corps du Christ a-t-il été déposé sur cette dalle rectangulaire, la pierre de l'onction, qui ne fait vraiment pas son âge ?
Première option : on ne doute pas. On traverse l'église sur les genoux et les yeux humides. On vide ses poches sur la pierre pour bénir tout ce qu'on transporte avec soi. Pas de doute. Je ne sais plus où j'ai entendu ça, mais je partage : "La foi, c'est le doute".
Ces lieux sont saints parce c'est ici que ça s'est passé. Les pierres. La fontaine. La poussière. Dans un élan de mysticisme, chacun va récolter un peu de cette terre dans un sac ou une bouteille, au risque d'avoir de gros ennuis à la sécurité de l'aéroport. Cette dévotion, cette extase, cela m'a toujours mis mal à l'aise.
Le corps du Christ a-t-il été déposé sur cette dalle rectangulaire, objet de dévotions au Saint-Sépulcre ? |
En fait, la Jérusalem que l'on visite n'a rien à voir avec celle de Jésus. Les minarets et clochers qui se confondent de loin et semblent s'observer n'étaient pas là. Les églises que l'on visite n'ont souvent même pas un siècle (à Gethsemani par exemple). Et parfois, cela sent la reconstitution à plein nez.D'entrée, le prêtre qui nous accompagne fait la leçon :
C'est comme ça, il nous faut un lieu, un édifice, une pierre, une tombe pour faire mémoire. C'est simple. Ne pas aller chercher plus loin : le lieu est saint parce que c'est ici que les pèlerins ont choisi de faire mémoire. Et pas parce que l'on va poser ses pieds dans ceux du fils de Marie et Joseph."Nous sommes sur les lieux où l'ont fait mémoire".
"Ces lieux saints ne vous font rien.
Le mensonge est partout trop évident"
Flaubert, 1850
Cité par Régis Debray dans son excellent livre, Un Candide en Terre sainte, voici ce qu'en disait Flaubert, en 1850, dans une lettre à sa maman (Pour la citation, je te fais confiance, hein Régis).
"Les saints lieux? Impression nulle. C e qu'on voit ici de turpitudes , de bassesses, de simonie, de choses ignobles en tout genre dépasse la mesure ordinaire. Ces lieux saints ne vous font rien. Le mensonge est partout trop évident. Quant au côté artistique, les églises de Bretagne sont des musées raphaélesques à côté"
Chrétiens palestiniens en voyage scolaire au lac de Tibériade |
lundi 20 septembre 2010
Dans le désert du Néguev
Premier jour en Israël. Premier jour dans le désert du Néguev. Il représente 62 % de la surface du pays mais seulement 10% des habitants. Pas difficile de comprendre à la vue du sable, de la terre, des pierres, des cratères, des pics rocheux qui évitent la monotonie au voyageur. Des bédouins sont tout de même là, poussés vers les villes par l'Etat d'Israël depuis le années 1950.. Et des villes ont été créées (Arad, Dimona).
On commence par le début de l'histoire : la Genèse. " Au commencement, Dieu créa le Ciel et la Terre". La lecture se fait dans le cratère du Makhtesh Ramon. Un paysage lunaire mais pas uniforme. De la terre ocre, des pierres rouges, noires, mauves. Quelques petits filets d'eau aussi, encadrés par des brins d'herbe.
Le désert n'est pas totalement désert. Des villes ont poussé et les Israéliens ont mis en place un impressionnant réseau d'irrigation. On apprend que c'est ici qu'a été inventé le système du goutte-à-goutte (en 1959).
"Le désert n'est pas
si désertique
que ça"
Le premier jour, c'est également la découverte du rythme du pèlerinage. Ce n'est pas un voyage comme les autres. La portion touristique est réduite. Les temps de recueillement, collectifs ou solitaires, sont nombreux. J'avoue que, n'étant vraiment pas un fana de la messe, j'étais un peu effrayé par tous ces offices et temps de prière.
Prière matinale face au désert, au pied de l'hôtel. Évocation de la Genèse dans un cratère digne du Grand Canyon. Puis messe, dans les ruines de l'église byzantine d'une ancienne cité nabaténne, à Avdat.
Ici, dans ces lieux chargés de symbole, c'est autre chose.
"Le désert, nous dit la Bible, est le lieu de la rencontre avec le Seigneur, le lieu où Dieu parle", nous dit le père Michel Daubannes .
On imagine un espace vide, avec des dunes, quelques dromadaires. Rien à voir.
"Nous rencontrons un désert avec la vie: de l'eau presque partout, de l'électricité dans les villages, de la végétation, même des insectes sous les pierres du Maktesh Ramon. Bref, le désert n'est pas si désertique que ça. Il n'exclut pas toute vie. Dans la Bible, c'est le lieu de la Parole. Tout sauf le lieu de la mort! "
Première célébration dans le désert : Dieu ne m'a pas encore parlé directement mais ça viendra peut-être. Il reste encore neuf jours.
On commence par le début de l'histoire : la Genèse. " Au commencement, Dieu créa le Ciel et la Terre". La lecture se fait dans le cratère du Makhtesh Ramon. Un paysage lunaire mais pas uniforme. De la terre ocre, des pierres rouges, noires, mauves. Quelques petits filets d'eau aussi, encadrés par des brins d'herbe.
Le désert n'est pas totalement désert. Des villes ont poussé et les Israéliens ont mis en place un impressionnant réseau d'irrigation. On apprend que c'est ici qu'a été inventé le système du goutte-à-goutte (en 1959).
La descente vers le Makhtesh Ramon |
"Le désert n'est pas
si désertique
que ça"
Le premier jour, c'est également la découverte du rythme du pèlerinage. Ce n'est pas un voyage comme les autres. La portion touristique est réduite. Les temps de recueillement, collectifs ou solitaires, sont nombreux. J'avoue que, n'étant vraiment pas un fana de la messe, j'étais un peu effrayé par tous ces offices et temps de prière.
Prière matinale face au désert, au pied de l'hôtel. Évocation de la Genèse dans un cratère digne du Grand Canyon. Puis messe, dans les ruines de l'église byzantine d'une ancienne cité nabaténne, à Avdat.
Ici, dans ces lieux chargés de symbole, c'est autre chose.
"Le désert, nous dit la Bible, est le lieu de la rencontre avec le Seigneur, le lieu où Dieu parle", nous dit le père Michel Daubannes .
"Nous rencontrons un désert avec la vie: de l'eau presque partout, de l'électricité dans les villages, de la végétation, même des insectes sous les pierres du Maktesh Ramon. Bref, le désert n'est pas si désertique que ça. Il n'exclut pas toute vie. Dans la Bible, c'est le lieu de la Parole. Tout sauf le lieu de la mort! "
Première célébration dans le désert : Dieu ne m'a pas encore parlé directement mais ça viendra peut-être. Il reste encore neuf jours.
Dans les ruines de l'église d'Avdat |
jeudi 16 septembre 2010
14 mai : jour de joie, jour de peine
Premier jour, première gaffe.
La première nuit a été courte. Nous sommes arrivés très tard à notre hôtel d'Arad, une ville champignon sans charme qui a poussé dans le désert du Néguev. L'hôtel est à l'image de la ville : un grand rectangle de béton. Depuis la petite lucarne de la chambre, on voit flotter un drapeau à l'étoile de David. Derrière, dans la brume de chaleur, des montagnes pelées.
Il faut profiter du matin, il fait encore frais. Dans la journée, on devrait avoir du 35°, même en mai. Dans la rue, c'est le grand calme. Il y a des drapeaux d'Israël partout. Sur le bloc de maisons d'en face, les mêmes drapeaux. Les bâtiments sont entourés de barbelés. Ce n'est guère rassurant.
Notre guide est jeune, moins de trente ans sans doute. Il a l'air sympathique. Casquette de baseball, barbichette noire, look d'étudiant. Alors j'ai envie de tenter une approche. "C'est jour de fête, aujourd'hui, non ?" Il me regarde sobrement. Et répond en professionnel : "C'est la fête de l'indépendance d'Israël".
J'ai compris ma gaffe. Notre guide est palestinien. Il rajoute, plantant un poignard au coeur de mon ignorance : "Pour les Palestiniens, c'est un jour de deuil"
Quel crétin ! En lisant les guides dans l'avion, je n'avais pas relevé la date : normal, il n'y a rien de spécial à dire sur le mercredi 29 avril 2009. Sauf que, selon le calendrier juif, nous sommes le 14 mai (Yom haÂtsma'out en hébreux). C'est le 14 mai 1948 que David Ben Gourion a proclamé l'indépendance d'Eretz Israël, le pays d'Israël. Une renaissance pour le peuple juif.
Une catastrophe pour les Palestiniens ; ils ont donné le nom de Nakba à cette journée. Un pays mais deux peuples et deux visions de l'histoire. Il faudra s'y habituer ; si on n'a pas compris ça, on ne peut rien piger sur ce pays.
Le 14 mai, c'est tout simplement l'un des symboles du conflit israélo-palestinien.
Tous les ans, des manifestations ont lieu et les Territoires occupés sont bouclés. C'est pour cela que le guide prévu au départ n'est pas là ; il habite un village proche de Bethléem et n'a pu passer le mur de séparation, même avec son permis de travail. Son jeune remplaçant habite à Jérusalem, du bon côté du mur. Lui peut circuler plus librement.
Je viens de recevoir ma première leçon de géopolitique locale.
A suivre : dans le désert du Néguev.
La première nuit a été courte. Nous sommes arrivés très tard à notre hôtel d'Arad, une ville champignon sans charme qui a poussé dans le désert du Néguev. L'hôtel est à l'image de la ville : un grand rectangle de béton. Depuis la petite lucarne de la chambre, on voit flotter un drapeau à l'étoile de David. Derrière, dans la brume de chaleur, des montagnes pelées.
Il faut profiter du matin, il fait encore frais. Dans la journée, on devrait avoir du 35°, même en mai. Dans la rue, c'est le grand calme. Il y a des drapeaux d'Israël partout. Sur le bloc de maisons d'en face, les mêmes drapeaux. Les bâtiments sont entourés de barbelés. Ce n'est guère rassurant.
"Pour les Palestiniens, c'est un jour de deuil"
Notre guide est jeune, moins de trente ans sans doute. Il a l'air sympathique. Casquette de baseball, barbichette noire, look d'étudiant. Alors j'ai envie de tenter une approche. "C'est jour de fête, aujourd'hui, non ?" Il me regarde sobrement. Et répond en professionnel : "C'est la fête de l'indépendance d'Israël".
J'ai compris ma gaffe. Notre guide est palestinien. Il rajoute, plantant un poignard au coeur de mon ignorance : "Pour les Palestiniens, c'est un jour de deuil"
Colombe à Bethléem |
Sur le mur de séparation, à Bethléem |
Une catastrophe pour les Palestiniens ; ils ont donné le nom de Nakba à cette journée. Un pays mais deux peuples et deux visions de l'histoire. Il faudra s'y habituer ; si on n'a pas compris ça, on ne peut rien piger sur ce pays.
Le 14 mai, c'est tout simplement l'un des symboles du conflit israélo-palestinien.
Tous les ans, des manifestations ont lieu et les Territoires occupés sont bouclés. C'est pour cela que le guide prévu au départ n'est pas là ; il habite un village proche de Bethléem et n'a pu passer le mur de séparation, même avec son permis de travail. Son jeune remplaçant habite à Jérusalem, du bon côté du mur. Lui peut circuler plus librement.
Je viens de recevoir ma première leçon de géopolitique locale.
mardi 7 septembre 2010
"Vous pouvez bien attendre un peu"
Aéroport Ben Gourion. Tel Aviv. On descend une grande allée en marbre. Pour déboucher sur une longue file d’attente. Au bout, des jeunes femmes en uniforme bleu attendent nos passeports dans leur petite cabine. À chacun son tour. Ca ne rigole pas. Elles vérifient sur leur écran d'ordinateur notre identité, jettent un regard direct et froid sur chaque visage. Ca prend du temps. Il est tard et tout le monde est impatient de respirer l'air de cette terre, berceau des trois religions monothéistes.
La soixantaine, chapeau et costume noir, derrière sa belle barbe blanche mon voisin de file d'attente a le sourire de celui qui rentre à la maison retrouver les siens. Il s’amuse de l’impatience des pèlerins français, ce groupe fatigué et impatient d’en découdre avec la terre d’Israël.
"Vous pouvez bien attendre un peu.
Nous, on a attendu deux mille ans avant de revenir"
“Vous pouvez bien attendre un peu, lance-t-il. Nous, on a attendu deux mille ans avant de revenir”.
Ce n'est pas qu'une boutade.
Terre sainte, Israël, Palestine, Cisjordanie, Territoires occupés, etc
Quelques heures plus tôt, nous avons rejoint notre groupe, à Roissy. Eux arrivent de Normandie, diocèse d’Evreux. Nous du Berry. Faire ce voyage avec des inconnus, ça me va très bien.
Sac à dos, guides touristiques, foulard jaune du pèlerin, chacun sa Bible. L’envol vers Tel Aviv se fait dans une zone réservée.
Dans l’avion, on a tout le temps de s’imaginer ce qui nous attend. Complexe. Depuis que ce voyage est décidé, je ne sais trop dire où je vais : Terre sainte, Israël, Palestine, Territoires occupés, Territoires palestiniens, Cisjordanie. Embarqué avec un groupe de catholiques – dont deux prêtres, une sœur et un diacre - à la rencontre des chrétiens, je vais assurément en Terre sainte. Mais quand je parle de ce voyage, je rajoute toujours Israël, comme si cette Terre sainte ne reflétait pas toute la réalité de ce voyage. (Carte)
Si je pars rencontrer des chrétiens et visiter des lieux saints, je pars aussi dans un pays en guerre Avec l’envie de voir, écouter et tenter de comprendre. Et une phrase en tête, entendue dans la bouche d’un habitué de ce voyage : “À chaque fois que je reviens, je trouve la situation encore plus complexe”. En fait, je pars d'abord pour voir et essayer de me faire ma propre opinion.
Quelques mois avant, Gaza était sous la mitraille
Nous sommes en mai 2009. En décembre 2008, Gaza était sous la mitraille. Les réservations pour le voyage se sont arrêtées avec l’opération israélienne contre ce petit bout de terre palestinien aux mains du Hamas, coincé entre la mer et Israël. Ceux qui sont dans l’avion ne sont pourtant pas des aventuriers. Une sœur qui fait là le voyage de sa vie, offert par ses condisciples. Un couple “pittoresque” de Normands, qui regrettent déjà leur petit-déj' au camembert et qui auront du mal à suivre le rythme. Une jeune femme qui a pour projet de se faire baptiser l’année suivante dans le Jourdain ; elle est en repérages. Deux frangines, des couples, des femmes seules. Des croyants mais aussi des mal-croyants (je me classe plutôt dans la seconde catégorie). Et nous, couple de trentenaire, attirés à la fois par l'idée de découvrir les lieux de la Bible en vrai et l'envie de mieux comprendre ce qui se joue ici. Observateur, avec un maximum de recul sur ce que je vais voir.
Et puis, Jérusalem cela ne se refuse pas.
C’est à mon tour. Derrière sa vitre, une très jeune femme dont on voit à peine le visage. J’imagine qu’elle fait son service militaire ici. Le motif de mon séjour ? Tourisme. Mon anglais ne va guère plus loin. Elle regarde les passeports assez longuement, tape sur son clavier, scrute son écran. Et finit par poser le tampon bleu de l’État d’Israël sur le papier.
Avant d’en arriver là, Daniel (le chef du groupe) avait conseillé de faire poser le tampon sur une feuille volante, pour éviter les problèmes futurs lors d’un hypothétique voyage en terre arabe (Jordanie, Syrie…). Nous avons préféré faire tamponner notre passeport.
Une sorte de marque de courtoisie pour le pays qui nous accueille.
A suivre : Premier jour, première gaffe
A suivre : Premier jour, première gaffe
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